La rédaction de Boubacar
Au travers de ces lignes le voile se lève sur ce qu’il en est de vivre en brousse quand on est un jeune élève et des difficultés à surmonter pour apprendre.
Le soleil est déjà levé ; dans quelques heures il fera chaud, très chaud ; l’ombre aura disparu. Je préfère la pluie, quand le ciel tout noir déverse ses seaux d’eau sur les champs, mais pas les moustiques qui en profitent pour piquer l’un, piquer l’autre, et donner la fièvre ; à l’automne je tremblais comme mon grand-père, mon front était brûlant ; au dispensaire de Louly, Georgette, l’infirmière, m’a dit que j’avais 39°9 ; elle m’a donné 3 cachets pour soigner mon palu.
L’école est encore loin et marcher dans le sable est fatigant. Ma jambe me fait de plus en plus mal mais bientôt je retrouverai mes copains ; et si Djiby a encore son vieux ballon dégonflé, le chemin paraîtra moins long.
Aujourd’hui j’ai un peu peur ; le maitre a donné une leçon à apprendre mais, hier soir, il n’y avait plus de bougies à la maison, alors je n’ai pas pu la revoir. C’est Awa, ma grande sœur qui est en CM 1 qui a préparé le repas. Il faut qu’elle apprenne beaucoup de choses parce qu’en avril elle a été fiancée ; heureusement, elle continue encore à aller à l’école. Ce n’est pas comme Modou qui, souvent, est obligé de garder les troupeaux de sa tante.
Moi je rate juste le début de l’année quand il faut ramasser les arachides, les faire sécher, les mettre en tas avant que toutes les femmes ne viennent aider pour les vanner.
Au village, je vis dans une case en banco, avec ma grand-mère, mes frères et sœurs. Mon papa travaille à Dakar, il est jardinier et maman fait la cuisine et le ménage dans une grande maison. Parfois ils reviennent, alors j’ai les yeux qui brillent, un peu parce qu’ils nous racontent la ville et un peu parce que je sais qu’ils repartiront bien vite. Je n’ai jamais été à la ville, même à Mbour où il y a la mer et beaucoup de bateaux qui ramènent du poisson. J’en ai mangé une fois quand les parrains sont venus repeindre l’école ; comme Jean-Baptiste, le fils du directeur est mon ami, j’ai pu en goûter dans le grand plat qu’on s’est partagé. Mais j’ai préféré le riz et la sauce avec plein d’oignons.
Les parrains avaient apporté des habits ; j’ai eu un T-shirt tout neuf que j’ai mis pour la fête où on a chanté et dansé pour les remercier.
Et puis maintenant, l’école est toute repeinte ; dehors elle est rouge, un peu comme la latérite et dedans jaune et bleue. On y voit bien mieux même si, assis au fond, Seynabou et Aissatou disent qu’ils n’arrivent pas à lire ce qui est écrit au tableau. Peut-être il leur faudrait des lunettes, rouges comme celle de Patou, une des marraines !
Deux fois par semaine on a cours l’après-midi ; moi je reste à l’école parce qu’il fait trop chaud pour rentrer au village et qu’il est trop loin. J’attends ; et quelques fois Jean-Baptiste m’apporte les restes de son repas. Son papa lui a dit que les parrains allaient faire une cantine ; ce serait bien de pouvoir manger pour bien travailler l’après-midi.
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